Date de publication :
07/04/2022
Dans un rapport rendu le 31 mars 2022, le Sénat estime que les revalorisations du Ségur de la santé sont insuffisantes.
Le 13 juillet 2020, après la première vague de Covid-19 (qu’on espérait à l’époque être la dernière), le ministère de la Santé a consenti d’importantes hausses de salaires aux soignants hospitaliers dans ce qu’on a appelé les « accords de Ségur ». Dix-huit mois plus tard, la commission d’enquête du Sénat sur « la situation de l’hôpital et le système de santé en France » a rendu son rapport dans lequel elle évalue les apports de ces accords.
Si les sénateurs reconnaissent « l’effort salarial sans précédent » du gouvernement en faveur des soignants hospitaliers, ils estiment qu’il a été trop tardif. Ils écrivent notamment que « le saupoudrage de ces mesures au fil des années 2020 à 2022 et leur extension sans réflexion d’ensemble et par à-coups aux "oubliés du Ségur" auront généré une amertume qui ne tarit pas ».
La qualité de vie au travail oubliée par le Ségur
La chambre haute considère donc que le gouvernement n’est pas allé assez loin dans sa volonté de mieux rémunérer les soignants qui se sont trouvés « en première ligne » lors de la pandémie. A titre de revalorisation supplémentaire, les parlementaires proposent que les heures supplémentaires et le temps de travail additionnel soient « mieux pris en compte et encadrés » via une « revalorisation du travail de nuit et le week-end » qui devra être « revue plus fréquemment pour tenir compte de l’évolution du coût de la vie ».
Le Sénat souhaite également que soit abordée la question de la qualité de vie au travail des soignants. « Ce sont avant tout les conditions de travail dégradées qui génèrent une désaffection préoccupante à l’égard de l’hôpital » note ainsi la commission qui évoque notamment le « manque de temps médical et soignant » qui génère un « profond sentiment de perte de sens » et « des départs de personnels en cours de carrière ».
Pour pallier cette désaffection, les recommandations du rapport du Sénat ne sont pas nouvelles. Il est notamment proposé d’accentuer la délégation des tâches administratives à des secrétaires médicales pour permettre aux médecins et infirmiers de dégager plus de temps médical et de renforcer les effectifs d’infirmiers et d’aides-soignants pour augmenter le ratio de soignants par patients. Autre proposition du Sénat sur ce point : améliorer l’accès à la formation continue et développer les passerelles entre les professions.
Un retour des services « à l’ancienne »
Les sénateurs abordent également la question de la gouvernance hospitalière. Sur ce point, tout comme les syndicats, ils proposent de donner davantage de poids aux représentants des soignants dans les instances dirigeantes de l’hôpital, en augmentant les pouvoirs des CME et en diversifiant les profils de directeurs, par exemple en nommant à ces postes d’anciens praticiens hospitaliers. Connu pour son conservatisme, la chambre haute est également favorable à un retour des services « à l’ancienne » avec un binôme constitué d’un cadre de santé et du chef de service et un effacement progressif des « pôles ».
S’agissant des questions financières, les parlementaires ne cachent pas leur rejet du T2A, estimant qu’il faut « tourner la page » de ce mode de financement pour « accélérer l’expérimentation d’un nouveau modèle de financement des activités hospitalières du champ "médecine, chirurgie, obstétrique” (MCO) ». Le rapport recommande ainsi la création d’une « dotation populationnelle » à mi-chemin entre la dotation globale et la T2A et préconise de rendre moins contraignant l’ONDAM hospitalier.
Le Sénat rejoint Pécresse sur la 4ème année d’internat de médecine générale
Enfin, le Sénat se penche sur une question grandement oubliée du Ségur, à savoir le rôle de la médecine de ville dans le système de santé. Tout comme la candidate LR Valérie Pécresse, la chambre haute préconise de créer une 4ème année d’internat de médecine générale qui s’effectuerait dans les déserts médicaux. Le Sénat souhaite également développer l’exercice infirmier en pratique avancée et recruter plus d’assistants médicaux. S’agissant de la collaboration entre la ville et l’hôpital, les parlementaires estiment qu’il faut « organiser des filières d’admission directe des patients sans passage par les urgences et préparer leur sortie d’hospitalisation en lien avec le médecin traitant ».
C’est donc un rapport extrêmement complet sur la situation de l’hôpital public et du système de santé français que les sénateurs ont élaboré, mais on pourra regretter une absence de chiffrage qui fait de ces diverses propositions un vœu pieux.
Nicolas Barbet
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